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Krasojevic : photographe de synthèse

Quand elle sert l’illustration de l’architecture, l’imagerie de synthèse cherche le plus souvent à reproduire l'image d'une réalité à venir. C’est dès lors généralement sur base de la perspective géométrique que s’échafaude cette représentation théorique. La tentation du photoréalisme, c’est-à-dire du réalisme inspiré par l’acte photographique, compose habituellement in fine une photographie de synthèse. Parfois, quand l'imagerie de synthèse parvient à s’affranchir plus avant des contraintes de la réalité, elle crée dans la foulée l’hyperréalisme, sorte de photoréalisme concupiscent, qui touche parfois à l'onirisme.

Quand elle n'est pas réduite au photoréalisme, la photographie de synthèse reconstruit numériquement un monde dans ce qu’il a de nécessaire et de suffisant pour la représentation. Les artefacts de la photographie optique deviennent éléments de rhétorique. Le spectateur combine une lecture plutôt dénotative et un jugement de valeur. Et comme toute image, elle entretient des relations avec une myriade d’autres représentations. De fait, c'est très généralement la forme affirmative qui l’emporte en matière de représentation d’architecture, tant pour l’œuvre qui se présente comme achèvement paramétré d’un ensemble de contraintes imposées, que pour des images qui portent un caractère iconique, et se veulent un produit à inclure dans le registre de la matérialité, existant en lui-même. Un objet pour lui-même qui occulte de fait tout ce qui relève des effets produits par l'objet architectural en tant que dispositif de mise en relations.

A la confluence de l’architecture et des arts plastiques, l’architecte matérialise ainsi la tendance polysémique de la représentation architecturale contemporaine, partagée entre deux convictions, l'une qui cherche à réfléchir sur le réel par la représentation fictionnelle, l'autre qui table sur la dissociation radicale de l'idéal et de l’idéel.

Un étrange lien s’instaure dans l’équilibre instable de l’aporie ainsi constituée. Un rapport antagoniste qui nous enjoint ainsi d’une double dé-réalisations. La première s’acharne à reconstituer le dispositif d’un monde encore capable de se réduire à la visibilité donnée par les images. La deuxième, comme le montre Margot Krasojevic, impose une dés-implication du regard par la matérialisation de contraintes non généralement visibles, une transposition littérale de l’apparence, un onirisme apologique.

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